lundi 17 mai 2010

Attention Alentir !


Les “plaisirs minuscules” de Philippe Delerme sont loin d’être minuscules. Ils sont la poésie du temps apprivoisé par un auteur qui sait goûter ce que la vie a de plus insignifiant à offrir. Littérature du rien qui fait tout et nous embarque dans des aventures matinales -- la rue déserte offerte aux lève-tôt en quête du croissant dominical, en été, en hiver, dans le métro parisien (Ah! Devenir un personnage de Magritte) –automnales… Les PM sont aussi l’expression d’une nostalgie, celle d’un temps révolu (une certaine vieille France), que l’auteur fait ressurgir avec bonheur dans des récits que l’on pourrait qualifier d’épiphaniques. Soudain les choses deviennent miraculeuses, le plus insignifiant prend des proportions… Plaisirs kinesthésiques et sensoriels qu’il convient d’alentir, comme ces activités préprandiales des « heures creuses de la matinée », lorsqu’on écosse les petits pois, mais aussi accès à la transcendance et à l’essence des choses minuscules. On pense à Husserl. Philippe D sait traverser les formes et les rapports pour atteindre la nature intime des choses : le secret d’un couteau, la force pacifiante du petit pois, l’odeur (douloureuse) des pommes, la différence entre le vélo et la bicyclette. Sensualisme démodé ? Aucun savoir constitué ne saurait décrire choses et évènements tels qu’ils sont appréhendés par la voie des sens et de la conscience de Philippe D. La Première Gorgée de Bière et Autres Plaisirs Minuscules, c’est de la phénoménologie appliquée au fil de récits à lire en rêvant du temps retrouvé, à lire lentement afin de ne rien manquer.

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